Regard d’historien sur le patrimoine québécois de La Rochelle

Que l’on regarde « La Louise du Canada » ex-voto conservé à la cathédrale Saint-Louis, où les hôtels particulier de la rue Réaumur propriétés de riches marchands actifs dans la traite de la fourrure, la pierre de La Rochelle garde la mémoire de la Nouvelle-France. Didier Poton, professeur d’Histoire moderne à l’Université et spécialiste de la question franco-québécoise* en relève avec nous les traces dans l’architecture de la Ville.

Sur la façade arrière de l’Hôtel de Ville, il y a des têtes dites de « Huron » ou de « Sauvages ». Sont-elles de simples évocations ou bien ont-elles valeur documentaire sur la réalité du visage des premières nations. Qui les a sculptées ?

Ces visages ont dû être sculptés à partir de gravures et d’éventuels dessins qui circulaient dans les villes portuaires en contact avec l’Amérique du Nord. Il ne faut pas oublier aussi que des Amérindiens sont « venus » en France.

Dans quelles circonstances l’artiste québécois Pierre-Noël Levasseur** s’est-il retrouvé à sculpter le décor de la Chambre de Commerce ?

Commander à un artiste québécois de participer au décor de la Chambre de commerce témoigne de l’intérêt des négociants de la Chambre de l’importance pour les trafics entre la ville et Québec et plus largement la Nouvelle-France et nous renseignent sur un point intéressant : les échanges artistiques et culturels ne se faisaient pas uniquement dans le sens France > Nouvelle-France.

Quelles sont ces pierres dites « canadiennes » sur lesquelles nous marchons, rue de l’Escale et dont on prétend qu’elles viennent du Québec?

Les pierres rue de l’Escale sont surtout des pierres venus d’Europe du Nord et non du Canada. Elles étaient vraisemblablement utilisées comme pierres de lest des navires néerlandais, allemand et scandinaves venus charger vin et sel à La Rochelle.

Y a-t-il pour vous un lieu plus secret, moins évident que la Tour de la Chaîne mais aussi emblématique de la relation avec la Nouvelle France, et dont vous aimeriez nous entretenir?

Mon lieu secret: les rayonnages où ont été classés plus de 10 000 ouvrages et numéros de revues (Histoire, Histoire de l’Art etc.) données par le Canada en 2013 à la suite de la fermeture de la bibliothèque du Centre Culturel Canadien à Paris. Une opération montée avec le soutien de l’Institut des Amériques et les Bibliothèques Universitaires de Poitiers (littérature anglophone canadienne) et de Limoges (littérature francophone canadienne). La Rochelle dispose désormais d’une des plus riches bibliothèque sur l’histoire du Canada en Europe !

*De Didier Poton, lire : La Rochelle-Québec, Embarquement pour la Nouvelle-France (éditions du Patrimoine).

**né en 1719 à Québec Pierre-Noël Levasseur est envoyé à Rochefort pour se perfectionner dans la sculpture d’ornementation des vaisseaux. Vers 1760, il quitte les ateliers de la Marine pour travailler à son propre compte. Entre 1763 et 1769, il réalise une partie du décor sculpté de la chambre de commerce de La Rochelle. Il ne reviendra jamais en Nouvelle-France.

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